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CHAPITRE V: LA SYNTHÈSE GRANULAIRE EN COMBINAISON
AVEC DAUTRES TECHNIQUES DE SYNTHÈSE.
Dans le deuxième chapitre, jai traité les différentes caractéristiques des particules élémentaires dans la synthèse granulaire. Du point de vue du timbre, la caractéristique des grains la plus importante est peut-être leur forme donde. Quand on utilise des grains synthétiques, les diverses façons de générer la forme donde de chaque grain sont liées aux différentes techniques de synthèse quon connaît. Donc, on a une gamme très variée de possibilités pour générer des grains avec un timbre différent. Jai déjà parlé des diverses applications qui ont utilisé des grains générés par fréquence modulée (FM) (Truax, 1986. Jones et Parks, 1987), ainsi que des applications qui ont utilisé des grains générés par synthèse additive (Truax, 1988. Roads, 1991). Dautre part, on a vu aussi quon peut générer les grains à partir des échantillons. Cette technique sappelle granulation temporelle, et avec elle on peut effectuer certains traitements du signal semblables à ceux des techniques danalyse-synthèse, comme la dilatation et la contraction temporelle, et la synthèse croisée (voir deuxième chapitre).
Dans ce chapitre janalyserai dautres possibilités de génération de la forme donde des grains, mais surtout, on verra comment on peut mélanger le résultat global de la synthèse granulaire avec dautres techniques de synthèse, cest-à-dire, la réalisation de la synthèse granulaire quel que soit le type donde des grains, et ensuite le traitement du son résultant, soit en utilisant les techniques danalyse-synthèse, les techniques de synthèse substractive, les techniques de traitement denregistrements (Smith, J.O. 1993), ou autres techniques.
I.- La synthèse granulaire et la convolution.
1.- La convolution.
Quand deux formes donde sont multipliées, le spectre de la forme donde résultante nest pas le produit des deux spectres des formes donde prises individuellement. Le spectre de deux formes donde est la convolution des spectres de deux formes donde individuelles (Moore, 1990). La convolution constitue la multiplication de deux spectres, et peut être représentée par léquation suivante: DFT(f (n) g (n)) = F (k) * G (k)
où f (n) et g (n) constituent le nombre déchantillons des deux formes donde; F (k) et G (k) constituent les spectres de deux formes donde (les spectres sont calculés par la transformée discrète de fourier); et où * indique la convolution entre les deux spectres. Dans cette convolution, chaque point dans le spectre discret de fréquence de lentrée F est convolué avec chaque point du spectre discret de lentrée G .
Le résultat de la convolution entre deux signaux sonores est une espèce de synthèse croisée où les fréquences communes des deux spectres sont renforcées (Erbe, 1992, 1994). Ce résultat équivaut au filtrage du spectre dun son par le spectre dun autre son (Roads, 1993a). Toutefois, leffet de la convolution peut être relié à dautres types de transformations sonores comme la spatialisation, la modulation, les modèles dinteraction entre sources dexcitation/résonance, et des transformations temporelles telles que: lissement dattaques, échos multiples, simulation dune pièce, barbouillement dans le temps, et réverbération.
Prenons les transformations temporelles et donnons un exemple. La création déchos multiples se fait en multipliant des impulsions courtes qui sont espacées par des silences suffisamment longs, avec un signal sonore déterminé. Ici, le résultat de la convolution est égal à la répétition dans le temps du signal sonore à lentrée, car toutes les amplitudes des fréquences du signal sont multipliées par une constante (toutes les fréquences du spectre des impulsions ont la même amplitude) (Figure 1a). Dans cette conception temporelle de la convolution, les sons granulaires peuvent jouer un rôle intéressant. Par exemple, pour effectuer la réverbération dun son au moyen de la convolution, on utilise un bruit blanc avec une enveloppe damplitude exponentielle décroissante. Des réverbérations colorées peuvent être obtenues si on utilise des nuages granulaires avec une bande de fréquence large et de haute densité, et avec une amplitude exponentielle décroissante. On parlera en détail de ces effets un peu plus tard.
Figure 1.- a) La convolution dun signal a avec un signal b qui contient deux réponses impulsionnelles suffisamment espacées donne comme résultat la répétition de lécho de a à lendroit de la deuxième impulsion de b . b) Quand les impulsions de b se rapprochent, les partiels de a commencent à se chevaucher (Roads, 1993a).
Pour conclure cette section, il ne faut pas oublier que leffet de la convolution dépend entièrement de la nature de deux signaux sonores à lentrée. La convolution pure ne bénéficie pas dun contrôle des paramètres. Par exemple, léquilibre de la mixture entre deux spectres convolués ne peut pas être altéré; il sera toujours le même. Donc, pour bien profiter de la convolution, il faudra bien connaître les différents résultats des diverses combinaisons des signaux sonores, ainsi que la cause de ces résultats; de cette manière, avec un peu de pratique on réussira à les prévoir.
2.- Les différentes transformations sonores au moyen de la convolution.
Je vais décrire les différentes transformations sonores effectuées avec la convolution selon la classification et les expériences réalisées par Curtis Roads (Roads, 1993a), et je vais élargir cette liste en ajoutant mes propres expériences et conclusions.
a) Filtrage-croisé.
Les effets du filtrage dun son par un autre sont les suivants:
· Si les deux signaux sont longs en durée et lun des deux signaux à lentrée a une attaque lisse, leffet dominant de la convolution est une altération spectrale.
· Si les deux sources ont une durée longue et chacune a un ton fort, et si lune des deux sources a une attaque lisse, le résultat contiendra les deux tons et lintersection de leur spectre. Ceci constitue une espèce de mixage, mais où les résonances communes des deux tons sont renforcées.
· La convolution est particulièrement sensible aux caractéristiques de lattaque des sources. Si lune de deux sources a une attaque lisse, le résultat de la convolution aura toujours une attaque lisse.
· On ne peut pas altérer léquilibre entre les deux spectres.
a.1) Auto-filtrage.
Ceci constitue un effet que jai découvert et que jai beaucoup utilisé pour dévoiler ou renforcer les fréquences spectrales prédominantes dun son. Cette technique fonctionne particulièrement bien quand on a un son avec des bandes spectrales bruiteuses que lon veut faire disparaître. Par exemple, dans lenregistrement du crissement des pneus dune voiture, le bruit du moteur est inévitablement inclus. Puisque seul le crissement mintéressait (un ton clair avec quelques composantes spectrales en fréquence), jai convolué lenregistrement du son de la voiture avec lui même. Le résultat a été un anéantissement en dB du bruit du moteur et une intensification des fréquences prédominantes du crissement des pneus. Avec de sons encore plus bruiteux dont on a seulement quelques composantes spectrales en fréquence isolées et claires, on peut tout de même les faire ressortir en convoluant le son avec lui-même, puis en convoluant le résultat avec lui-même, et ainsi de suite.
b) Échos.
Les effets décho sexpliquent de la façon suivante: toutes les réponses impulsionelles (IR) dans une des entrées de la convolution ont comme résultat la copie de lautre signal.
· Pour créer un effet décho multiple, il faut simplement convoluer un son avec une série dimpulsions séparés par les temps de delai désirés (Figure 2).
Figure 2.- Convolution dun motif rythmique dimpulsions (ou grains) avec un son de pizzicato de violon. (a) Impulsions. (b) Pizzicato. (c) Convolution.
c) Simulation dune pièce.
· Pour simuler leffet dun son qui se joue dans une pièce (ou une salle) quelconque, il faut simplement enregistrer la réponse impulsionelle (IR) de la pièce (sa réponse à une impulsion forte, comme un frappement de mains par exemple). Si cette IR est convoluée avec un son arbitraire, il paraîtra que le son a été joué dans cette pièce.
d) Positionnement spatial.
Cette technique est semblable à la précédente, mais elle a besoin davoir les sons convolués enregistrés dans un format à chenaux multiples.
· Pour positionner un son dans un point précis dans lespace il faut générer une impulsion sur ce point et convoluer le son avec un enregistrement à chenaux multiples de la réponse impulsionelle de cet espace.
e) Réverbération.
· Pour générer une réverbération élémentaire il faut convoluer un signal avec du bruit blanc, où le bruit a une attaque pointue et une chute exponentielle. La durée du bruit détermine le temps de réverbération.
· Pour colorer cette réverbération il faut filtrer le bruit avant de le convoluer.
· Si le bruit a une chute logarithmique (et non exponentielle), le son à lentrée apparaît suspendu dans le temps avant la chute.
On peut aussi utiliser un bruit granulaire de haute densité avec un décroissement exponentiel pour générer une réverbération colorée.
f) Modélisation dexcitation/résonance.
Beaucoup de sons instrumentaux ou vocaux peuvent être simulés par un modèle séparé en deux parties: un signal dexcitation qui est filtré par un signal de résonance. Lexcitation constitue laction de la vibration dune corde, la vibration dune anche, ou un flux dair dans un tube. La résonance est la réponse du filtrage du corps dun instrument. La convolution nous permet dexplorer un monde virtuel où un son excite les résonances dun autre son (Roads, 1993a). Ces deux sons peuvent être très différents, et lon peut effectuer ainsi des croisements très divers. Par exemple, on peut faire résonner un gong avec des attaques de pizzicato dun violoncelle.
· Pour bien réussir une simulation, lexcitation doit être brève, un signal de type impulsionel (percussif), avec une ou plusieurs attaques pointues. La résonance peut constituer nimporte quel son.
Dans le chapitre précédent, on a analysé la technique granulaire formantique de De Poli et Piccialli (1991) qui utilise la conception dexcitation/résonance, en effectuant une convolution entre un train dimpulsions (les grains) et diverses formes donde qui donnent les qualités spectrales du son résultant. En fait, la convolution peut constituer une technique de filtrage formantique assez précise quand on lenvisage dans une technique danalyse-synthèse comme celle-ci. Dautre part, la synthèse croisée avec les méthodes danalyse-synthèse seffectue aussi par une convolution, soit par la séparation de la source et la résonance (Arfib, 1991), soit simplement en multipliant les deux signaux sonores (Dolson, 1984). La première de ces techniques possède un contrôle majeur du spectre car on sépare chaque grain danalyse en deux grains différents (grain-source et grain-réponse) au moyen dune opération de type discret qui nous permet daffecter chaque paire de grains de lanalyse et davoir ainsi des transformations qui changent de manière plus fine dans le temps.
3.- La convolution avec des sons granulaires.
"The rolling of thunder has been attributed to echoes among the clouds; and if it is to be considered that a cloud is a collection of particles of water....and therefore each capable of reflecting a sound, there is no reason why very [loud] sounds should not be reverberated....from a cloud".
Sir John Herschel, dans Tyndall (1875).
Les nuages peuvent agir comme des réverbérateurs atmosphériques. Certains scientifiques du dix-neuvième siècle avaient observé que dans un ciel limpide, des tirs de canon étaient pointus, alors que quand le ciel était couvert de nuages, les tirs étaient accompagnés par un roulement ondulatoire semblable au tonnerre (Roads, 1993a). La convolution dune impulsion avec un nuage granulaire peut créer un effet analogue à celui de la réverbération atmosphérique. Roads appelle cet effet time-splattered (éparpillement ou aspersion dans le temps) pour traduire la non-uniformité des particules sonores dans cette réverbération granulaire. Avec la convolution entre un nuage granulaire AGS de large densité conformé par des particules sonores avec une réponse impulsionelle bien pointue, et un signal sonore, on pourrait imaginer comme résultat des centaines déchos. Toutefois, la proximité des grains crée des effets de barbouillement et de time-splatter qui vont dépendre des caractéristiques de lattaque du signal sonore à lentrée. Voici les deux principaux effets:
· Si le signal sonore à lentrée commence avec une attaque pointue, chaque grain génère un écho de cette attaque. Si le nuage de grains nest pas continue, alors les échos sont espacés de manière irrégulière dans le temps.
· Si le signal sonore à lentrée a une attaque lisse, le time-splattering est lissé et devient une étrange réverbération colorée (Roads, 1993a). La couleur de la réverbération est déterminée par le spectre des grains - un facteur de leur durée, enveloppe, et forme donde.
Les effets de la convolution avec des grains sonores peuvent beaucoup varier selon les propriétés du nuage granulaire et le signal à lentrée. Si les grains sont courts, espacés, pointus en attaque, et bruiteux en contenu spectral, et sils sont convolués avec un son aussi pointu en attaque, on aura comme résultat des échos clairs du son à lentrée et peu deffets de time-splattering. Voici une série deffets possibles décrits par Roads (1993a):
· Pour une attaque pointue à lentrée, une convolution avec une douzaine de grains courts en durée crée une distribution statistique déchos du son à lentrée (Figure 2).
· Le grains longs accentuent leffet de barbouillage dans le temps (time-smearing).
· Quand le son à lentrée a une attaque lisse, le résultat est un filtrage qui varie dans le temps et qui dépend du spectre des grains.
· Plus dense sera le nuage, plus les échos seront fusionnés dans un effet de réverbération.
Jajouterai un effet très intéressant produit par un nuage de grains dune durée de 20 à 40 millièmes de seconde avec une enveloppe gaussienne (ou dun autre type), et un contenu spectral harmonique ou inharmonique (mais non bruiteux), convolué avec le ton dun instrument dattaque pointue (un pizzicato, une attaque de piano ou de clavecin, une attaque de xylophone, etc). Le résultat nest pas la simple répétition des échos du son dorigine, mais la variation spectrale de ce son à chaque nouvel écho. Ceci est dû à linteraction entre la variation du spectre et de la fréquence des grains, et le spectre du ton instrumental. Avec un nuage de grains qui varient en fréquence mais avec un contenu spectral bruiteux, leffet résultant du spectre final sera toujours plus ou moins pareil, sauf si la densité et les fréquences des grains du nuage varient radicalement, mais même ainsi les changements du spectre des échos ne seront pas aussi nets quavec un nuage de grains non bruiteux. Dautre part, si on réalise cette même expérience avec un son harmonique à lentrée, comme un accord chanté par un choeur, le résultat sera laccentuation des différentes notes de laccord selon la fréquence et le spectre des grains convolués avec lui (voir exemples sonores dans lappendice).
Jai effectué plusieurs expériences de convolution des sons granulaires synthétiques AGS avec des signaux sonores des tons et des bruits dinstruments à vent cuivrés. Si lattaque du ton instrumental était pointue, alors les échos étaient plus nets, mais tout de même time-smeared et time-splattered, tandis quavec un son de soufflement dans le trombone, le résultat a été une réverbération colorée du bruit du soufflement, mais avec la résonance du corps du trombone (produit par le soufflement) beaucoup plus renforcée (voir exemples sonores dans lappendice). Dans le cas des échos, il est possible que les effets de time-smearing et de time-splattering aient été créés par linsuffisance dune attaque pointue des grains synthétiques, car jai utilisé lenveloppe gaussienne standard utilisée par Gabor et Roads (Roads, 1993b). Pour avoir des échos nets il faut avoir des enveloppes rectangulaires, trapézoïdes, ou triangulaires. Lenveloppe rectangulaire est peut-être la plus efficace, avec lavantage que dans le cas de la convolution on nest pas gêné par la création des effets de modulation (Roads, 1991); au contraire, plus bruiteuse sera lenveloppe, on obtiendra des échos plus nets. Pour parvenir plus facilement à ce résultat, il serait également souhaitable davoir des formes donde plutôt bruiteuses et des grains assez courts. Toutefois, on pourrait aussi rechercher le mixage du contenu spectral des grains avec le spectre du signal sonore, ainsi que diverses variations de leffet de time-smearing et de time-splattering; pour ceci, on pourrait réaliser un nuage de grains synthétiques dont la durée, le contenu spectral, les enveloppes et lespacement pourraient varier dans le temps, et lon pourrait effectuer ainsi un continuum entre les différents effets décho et de réverbération (Figure 3).
La convolution entre deux sons granulaires est également possible, mais le résultat nest pas très prévisible et des effets de barbouillage, de time-smearing et de time-splattering vont prédominer. Toutefois, le contour des bandes de fréquence des nuages sont toujours reconnaissables. En revanche, les effets à lintérieur des bandes seront parfois semblables à des effets sonores aquatiques, avec des portions plus ou moins réverbérées, et avec dautres portions plus ou moins bruiteuses (Figure 4).
Figure 3.- Avec une planification soigneuse du contenu spectral des grains et de leur espacement, on peut réaliser une convolution avec un signal sonore et obtenir un continuum entre différentes effets décho et de réverbération.
Figure 4.- La convolution du nuage granulaire (a) avec le nuage granulaire (b) donne le nuage granulaire (c). Ce résultat est un mélange deffets de réverbération aquatiques, de barbouillage, et des bandes bruiteuses. Les seules éléments de (a) et (b) qui peuvent être reconnaissables dans (c) sont les contours des largeurs de bande des nuages granulaires.
On nest pas obligé dutiliser des sons granulaires synthétiques ou même des granulations déchantillons (où les effets seraient particulièrement intéressants) pour effectuer la convolution avec un signal sonore. On peut aussi utiliser des sons de type granulaire issus de la nature tels que la pluie, les craquements du feu, des sons de feux dartifice, des sons de grains jetés par certaines plantes au printemps, etc. Lavantage avec ces sons est quon a des rythmes stochastiques très intéressants dès le départ, qui pourraient être utilisés pour produire des séquences sonores dans la composition électroacoustique dans le domaine de la macro-forme. Jai moi même créé des sons en utilisant le bruit de la pluie sur le plafond en bois de mon ancien appartement à Paris, convolué avec des cloches et avec dautres sons instrumentaux, et jai obtenu des résultats très intéressants (voir exemples sonores dans lappendice).
Pour conclure cette section, il faut se rappeler quil y a des techniques granulaires synchrones (De Poli et Piccialli, 1991) et danalyse-synthèse (Dolson, 1984. Arfib, 1991) qui utilisent la convolution comme une partie intrinsèque de leur fonctionnement. Dans certains de ces techniques, on bénéficie dun contrôle spectral plus fin grâce à lanalyse et à la séparation des grains danalyse en deux grains différents, lun agissant comme impulsion et lautre comme filtre.
II.- La synthèse granulaire et les filtres.
On peut considérer que la convolution est dans un certain sens une technique de filtrage, mais où lon a un contrôle de paramètres assez restreint (sauf avec certaines méthodes danalyse-synthèse); pourtant, la convolution est également utile pour créer des transformations sonores dans dautres domaines de la synthèse (comme on vient de le voir). En revanche, avec les techniques de filtrage traditionnelles on possède un contrôle total et lon peut sculpter le son avec une grande précision. Le filtrage agit sur un signal sonore soit par la décroissance damplitude de certaines composantes spectrales (synthèse substractive), soit par laugmentation damplitude de certaines composantes spectrales. Dans le deux cas, on a besoin davoir un signal à lentrée des filtres avec un spectre large et riche, comme du bruit blanc ou des impulsions étroites (narrow pulses). Pour cette raison, des nuages granulaires pourraient très bien servir comme matière première. Dautre part, on peut créer des résonances de type formantique en utilisant des filtres de deuxième ordre avec une largeur de bande étroite, qui vont dépendre de la fréquence et de la largeur de bande du filtre, mais aussi de lénergie spectrale de la source; finalement, on peut aussi créer des effets de réverbération en utilisant des filtres réverbérateurs tels que les filtres en peigne (comb filters), qui fonctionnent au moyen de lignes de délai bouclées et qui font sonner leur fréquence fondamentale en même temps que les fréquences déterminées du spectre du signal à lentrée.
Toute cette gamme deffets que je viens de décrire peut être appliquée à la synthèse granulaire. Il y a deux façons différentes de le faire. La première est la plus simple: on crée un son granulaire ou un nuage granulaire et on travaille ensuite sur ce résultat avec un programme danalyse-synthèse, de synthèse substractive, etc. La deuxième est plus compliquée mais plus intéressante. On peut réaliser une application de synthèse granulaire où le filtrage des grains se fasse en même temps que la synthèse. Ceci peut dailleurs être effectué de deux manières différentes: lune par le filtrage des grains à niveau individuel, et lautre par le filtrage du résultat global. Dans le logiciel GiST (Eckel, Rocha Iturbide, 1995) on réalise le filtrage des particules sonores au niveau individuel à cause des caractéristiques formantiques des grains nommés FOF (Fonctions donde formantiques) qui possèdent un paramètre qui modifie leur largeur de bande. Ceci est un facteur très avantageux car on peut effectuer des sons granulaires où lon peut générer des régions plus résonantes ou plus bruiteuses au niveau du quantum sonore (voir quatrième chapitre).
1.- Filtres substractifs.
Le filtrage substractif est la plus commune des techniques de filtrage. On peut effectuer cette technique soit au niveau du grain, soit au niveau global. Toutefois, je crois quil est plus logique de lutiliser en partant du résultat globale du nuage granulaire, car celui-ci constitue la matière première essentielle à être sculptée. Je peut facilement imaginer un nuage granulaire avec une bande de fréquence assez large qui varie dans le temps, et ensuite la sélection de différentes régions du nuage pour être anéantis ou renforcés en amplitude. De cette manière, on peut faire ressortir de nouveaux nuages en partant de la première, chacune une avec un niveau dintensité différent (Figure 5). La manière la plus simple deffectuer ce procédé serait dutiliser une technique danalyse-synthèse tel quAudio-Sculpt (IRCAM) au moyen des filtres passe-bande qui varient dans le temps.
Figure 5.- Filtrage de trois bandes de fréquence dun nuage granulaire. La bande la plus aiguë augmente lamplitude des grains tandis que les deux autres bandes éliminent complètement lamplitude des grains. Le résultat est la génération de trois nouveaux nouages granulaires extraits du premier nuage. Les grains du nuage du dessus possèdent une amplitude majeure.
2.- Filtres résonateurs.
Les filtres résonateurs typiques utilisés dans les systèmes informatiques musicaux sont communément appelés RESON (Dodge, Jerse, 1985). Ces filtres de deuxième degré créent des régions formantiques résonantes en partant des sons avec une bande spectrale large et homogène tels que du bruit blanc. Néanmoins, on peut aussi utiliser des sons bruiteux avec des bandes de fréquence larges qui ont de lénergie spectrale distribuée de manière homogène. Les nuages granulaires sadaptent très bien à ce type de filtrage.
Le logiciel Csound (Vercoe, 1986) possède des filtres très efficaces pour créer des régions formantiques résonantes. On peut par exemple effectuer un filtrage avec une série de filtres en parallèle (chacun avec une fréquence différente et qui peut évoluer dans le temps) en partant dun son granulaire quil faudrait synthétiser au préalable. La différence entre lutilisation dun son granulaire comme matière première au lieu de bruit blanc, est une légère variation de lintensité et de la couleur des sons fréquentielles résultantes. Cependant, quand les grains du nuage ont une attaque pointue et la densité du nuage nest pas très haute, on peut avoir aussi des résonances semblables aux sons de cloches ou de clochettes (selon la fréquence des filtres). Le contenu spectral de la matière première sonore utilisée disparaîtra toujours complètement, et les paramètres formantiques des filtres seront perceptibles seulement dans le résultat final. La seule variation importante au moment dutiliser divers sons granulaires est la qualité de la résonance des filtres du point de vue morphologique; pourtant, le contenu spectral sera toujours plus ou moins pareil.
Avec lapplication de la synthèse granulaire à partir déchantillons que jai développée à lIRCAM en 1993 avec Csound et PatchWork (Rocha Iturbide, 1994), il serait possible de réaliser une application de filtrage au niveau du grain si on utilise des sources sonores avec un spectre dense. La variation de la largeur de bande des filtres pourrait alors faire ressortir plus ou moins léchantillon dorigine, et on pourrait effectuer des processus entre des résonances granulaires pures et les grains dorigine. Dailleurs, ce procédé ressemble un peu au procédé effectué avec des grains FOF du logiciel GiST (Eckel et Rocha Iturbide, 1995), sauf quavec cette dernière technique, lorsquon a une largeur de bande égale à 0 Hz (résonance maximale) la résonance du filtre nest pas très nette (comme avec les filtres RESON de Csound); on conserve les caractéristiques spectrales des grains de léchantillon lu, avec un tout petit peu de résonance (voir logiciel GiST dans le quatrième chapitre). Cependant, en augmentant la largeur de bande, on aura un effet chaque fois plus bruiteux, semblable à celui du filtre RESON de Csound (quand on augmente sa largeur de bande).
3.- Filtres formantiques.
On peut appliquer un filtrage par régions formantiques à un nuage granulaire, et simuler ainsi une voix ou dautres instruments à caractère formantique qui vont se déplacer dans le nuage. Dans la technique danalyse-synthèse SVP (Depalle, P., Poirot, G. 1991), le filtrage formantique constitue une des différentes possibilités des techniques de filtrage. On peut choisir plusieurs séries de régions formantiques en parallèle, et les interpoler ensuite de façon linéaire; de cette manière, on peut par exemple effectuer des transitions continues entre des sons formantiques de la parole (de la voyelle a à la voyelle i, ensuite à la voyelle o , etc). Le bruit blanc est typiquement utilisé comme matière première pour le filtrage, mais on peut aussi utiliser des nuages granulaires qui vont modifier la couleur de la résonance des régions formantiques. Ces filtres sont différents des filtres utilisés dans la fonction RESON de Csound, car ils néliminent pas le reste du signal sonore; donc, on peut par exemple filtrer un gong avec les régions formantiques des voyelles aiou et percevoir en même temps lattaque et le corps du gong. Ceci donne un résultat hybride intéressant. On peut alors imaginer des combinaisons de sons métaphoriques et suggestifs, comme un nuage granulaire à partir de chants doiseaux filtrées par une voix.
3.- Filtres révérbérateurs.
Les filtres en peigne (comb filters) sont utilisés pour créer des effets de réverbération sur un signal sonore. Dans un filtre en peigne, le signal dentrée pénètre une ligne de délai, puis, quand il arrive à la sortie, il est encore alimenté à lentrée après avoir été multiplié par un facteur g. Le temps que prend le signal pour circuler à travers la ligne de délai est appelé temps de boucle (loop time). La réponse impulsionelle dun filtre en peigne est un train dimpulsions espacées de manière équidistante à un intervalle analogue au temps du boucle. Cette réponse a une chute exponentielle déterminée par les valeurs choisies par le temps du boucle et par le facteur g.
Leffet de passage dun filtre en peigne sur un signal sonore lui donne des caractéristiques réverbérantes; de plus, le signal à lentrée pousse le filtre à résonner dans sa fréquence naturelle, en additionnant alors une composante spectrale au signal sonore dorigine (équivalent à la fréquence naturelle du filtre). La résonance du filtre a une enveloppe semblable à celle trouvée dans la plupart des sons de type cloche - il a une attaque rapide et une chute exponentielle beaucoup plus longue (Dodge., Jerse, 1985). On peut bien sûr avoir plusieurs filtres en peigne en parallèle, chacun avec une fréquence différente; ceci va créer la sensation auditive daccords qui font résonner le signal à lentrée.
On pourrait utiliser des filtres en peigne en parallèle pour filtrer des sons granulaires. Jai utilisé lalgorithme du logiciel SYTER au GRM (le Groupe de Recherche de Musique à Radio France), mais toujours avec des sons de voix parlée ou de voix chantée, et jai obtenu des résultats musicaux très agréables; pourtant, je nai jamais imaginé le filtrage en peigne de sons trop complexes comme des nuages granulaires, probablement parce que jimaginais que le résultat serait trop réverbérant, barbouillé et chaotique. Néanmoins, on pourrait peut-être obtenir avec deux ou trois filtres en peigne en parallèle des résultats musicaux acceptables.
Les filtres résonateurs du logiciel Turbosynth (Digidesign) sont semblables aux filtres en peigne. Avec ces filtres ont doit déterminer la fréquence à réverbérer, le niveau de rétro-alimentation (feed-back), la polarité (positive ou négative), et le mixage entre le signal dorigine et le signal réverbéré. Cet algorithme est très efficace; je lai utilisé pour créer plusieurs sons sur mes compositions électroacoustiques, mais je ne lai jamais utilisé pour filtrer des sons granulaires. Le seule problème avec cet algorithme est que lon ne peut pas modifier les paramètres des filtres au cours du temps (fréquence, intensité, largeur de bande), tandis quavec lalgorithme des filtres en peigne du SYTER il est possible de le faire.
III.- Dautres applications des méthodes de synthèse traditionnelle aux formes donde des grains.
1.- Lamplitude modulée, la modulation en anneau et la modulation single-sideband.
Le concept de base de lutilisation de lamplitude modulée (AM) et de la modulation en anneau pour la génération des grains synthétiques est semblable à celui de lutilisation de la modulation en fréquence (FM). Lidée essentielle est quavec très peu de données, on peut faire varier radicalement le contenu spectral de la forme donde du grain. Toutefois, la principale différence est quavec la FM on a besoin de deux fréquences sinusoïdales pures seulement pour générer des spectres riches. Donc, la FM est efficace pour la création de grains synthétiques. En revanche, si lon veut affecter les grains dun échantillon, la FM nest pas appropriée, car on aura comme résultat un spectre excessivement dense. Lamplitude modulée, la modulation en anneau et la modulation single-sideband (dune bande unique) sont plus appropriées pour altérer le spectre des grains dun échantillon, puisquon a un moindre nombre de sidebands résultantes.
Dans un instrument typique damplitude modulée (Figure 6), loscillateur porteur (carrier) a une fréquence constante fc et loscillateur modulant a une fréquence fm . Si la forme donde de chaque oscillateur est une onde sinus, la sortie de loscillateur modulant est additionnée à la valeur qui exprime lamplitude que loscillateur porteur tiendrait (sil ny avait pas de modulation). Lamplitude de loscillateur modulant est exprimé comme une proportion de lamplitude non modulé de loscillateur porteur et elle est notée par la variable m, appelée index de modulation. Si m est égal à 0, il ny a pas de modulation, et si m est égal à 1, alors on a une modulation à 100%. Quand londe porteuse et londe modulante sont des sinus, on a de lénergie spectrale dans trois fréquences: la fréquence de londe porteuse (fc) , et les deux sidebands (fc + fm et fc - fm ). Lamplitude de la fréquence de londe porteuse ne varie pas avec lindex de modulation, tandis que lamplitude des sidebands dépend dun facteur de m/2 moins que lamplitude de la porteuse. Donc, si m est égal à 1, lamplitude des sidebands sera de la moitié de lamplitude de londe porteuse (Dodge,. Jerse, 1985).
Figure 6.- Instrument damplitude modulée avec une onde sinus comme porteuse et une onde sinus comme modulante (Dodge et Jerse, 1985).
Comme le spectre obtenu avec deux ondes sinusoïdales est pauvre, lutilisation de la AM serait plus efficace pour affecter le spectre des formes donde plus complexes. On pourrait utiliser soit des ondes avec plusieurs composantes sinusoïdales (Roads, 1985. Rocha Iturbide, 1994), soit des ondes complexes lues sur un échantillon. Prenons le premier cas et donnons un exemple dun instrument granulaire avec le logiciel de Csound (Figure 7).
Figure 7.- Fichier dorchestre des voix sinusoïdales modulées en amplitude pour la synthèse granulaire asynchrone.
Dans un instrument de ce type on peut affecter le spectre de la forme donde choisie (on a un fonction donde qui va de un à dix harmoniques) par la variation de la fréquence de londe porteuse, la fréquence de la modulante, et lindex de modulation. Toutefois, il nous suffirait dutiliser toujours la même fonction donde, probablement celle de dix harmoniques pour avoir un spectre résultant de trente composantes de fréquence (dix de la porteuse plus les vingt sidebands).
Le seul problème qui se présente au moment deffectuer la AM sur les grains est que lindex de modulation dépend de lamplitude des grains; il y a donc une interaction qui nest pas forcément souhaitable. Si lon veut avoir une modulation il nous faut des grains forts, tandis quavec des grains de basse amplitude on naura pratiquement pas de modulation.
On peut aussi utiliser la AM pour affecter des sons échantillonnés, mais la modulation en anneau pourrait être mieux adaptée pour ceci, car la porteuse est éliminée, et il reste seulement les deux sidebands générés par la modulation (Figure 8). Il est parfois convenable davoir moins de sidebands, car la modulation dun signal complexe peut donner trop de sidebands qui vont enrichir de manière excessive son spectre. Leffet résultant de la modulation en anneau est que si les composantes dorigine du son modulé ont un spectre harmonique, elles vont toutes disparaître, et on aura à leur place les deux sidebands produits par la modulation: fc + fm et fc - fm. Cet effet va produire la plupart du temps un spectre inharmonique. Dans le cas dune voix par exemple, toutes ses composantes en fréquence seront transposées deux fois. Si on a une composante de 500 Hz, et la fréquence modulante est de 33 Hz, la composante originelle de la voix disparaîtra et deviendra deux nouvelles composantes à 533 Hz et à 467 Hz. Si ce signal a 100 composantes en fréquence, on aura comme résultat un signal de 200 composantes dont aucune ne gardera sa fréquence dorigine. Le danger dans ce cas est que la voix peut devenir méconnaissable, pourtant, si lon contrôle les effets inharmoniques obtenus ils seront au moins musicaux.
Figure 8.- Altération du spectre dun signal par modulation en anneau.
Étudions maintenant un exemple dun instrument de synthèse granulaire à partir déchantillons, avec la modulation en anneau de ses grains (Figure 9). Dans cet instrument il ny a pas autant de variables quavec la modulation AM avec des grains synthétiques; en fait, on na même pas dindex de modulation. Le seul paramètre que lon peut changer pour modifier le spectre des grains est la fréquence de loscillateur qui fonctionne comme porteuse. Toutefois, différents effets harmoniques et inharmoniques peuvent être éteints par la simple modification de ce paramètre (dans lorchestre de Csound , il est représenté par la variable p6). Dans cet instrument granulaire, la variation de lamplitude des grains ne modifie pas lamplitude les sidebands.
Un synthétiseur granulaire avec modulation en anneau peut économiser beaucoup de travail au compositeur qui veut transformer le spectre des grains issus des sons instrumentaux. Pour donner un exemple, quand je réalisais des nuages granulaires en partant des instruments à cuivre pour la réalisation de ma composition Transiciones de Fase, je voulais produire une transformation graduelle du spectre des grains dune attaque de trompette. Jai dû alors copier plusieurs fois léchantillon de lattaque de la trompette, et puis jai altéré le spectre de chaque échantillon de manière graduelle vers les partiels aigus avec un pitch-shifter, (une technique qui effectue la modulation dune bande-unique). Puis, jai effectué la synthèse granulaire avec mon système de Csound-Patchwork en changeant de la lecture dun groupe déchantillons à lautre (toujours allant vers les échantillons plus aigus) avec lutilisation de deux tendency masks. En fin, si javais imaginé à ce moment-là la possibilité dutiliser la modulation en anneau de façon simultanée à la synthèse granulaire, jaurais pu transformer le spectre des grains plus facilement et économiser le temps de préparation des différents échantillons. Cependant, pour les besoins spécifiques de la transformation spectrale dont je viens de parler, jaurais dû plutôt réaliser lapplication dun pitch-shifter, car lavantage de celui-ci sur la modulation en anneau est quon change chaque fréquence du spectre du signal sonore à lentrée en additionnant une constante, sans augmenter pour autant le nombre des composantes spectrales. Avec le pitch-shifter on change seulement le rapport entre les composantes harmoniques, mais ceci rend aussi le spectre inharmonique. En outre, avec la modulation en anneau, la transposition seffectue au-dessus et au-dessous de la fréquence de chaque composante en même temps, et donc, il nest pas possible deffectuer une progression continue et pure vers le registre aigu ou vers le registre bas. Le seul problème avec la modulation dune bande unique (single-sideband modulation), caractéristique du pitch-shifter, est que son application à un système informatique est très compliquée du point de vue technique (Dodge., Jerse, 1985).
Figure 9.- Fichier dorchestre pour la granulation dun ou de plusieurs fichiers sonores avec modulation en anneau.
2.- Waveshaping.
Waveshaping est une méthode de synthèse avec laquelle on peut générer des spectres avec une évolution dynamique de ses composantes (comme avec la FM). Un waveshaper effectue la distorsion de lamplitude dun son et produit une altération de sa forme donde avec un subséquent enrichissement de son spectre. La caractéristique principale dun waveshaper est que le spectre quil produit change avec lamplitude du son car il constitue un processeur de caractère non linéaire.
Un waveshaper utilise une fonction de transfert (transfer fonction) qui met en rapport lamplitude du signal à la sortie avec lentrée. La fonction de transfert nous permet de prédire le changement du spectre de la forme donde à lentrée du waveshaper à partir de sa valeur damplitude. Une fonction de transfert non linéaire pourrait être F(x) = x3 , où la valeur de chaque échantillon à lentrée est multipliée au carré au moment de passer à la sortie (Dodge., Jerse, 1985).
Comme avec la FM, le waveshaping bénéficie dun contrôle continu du spectre par lutilisation dun index de modulation, ce qui rend possible la variation du spectre à travers le temps par la simple modification de la valeur dindex. La principale différence avec la FM est quavec le waveshaper il y a un rapport entre la variation damplitude de la forme donde et le spectre. Cette caractéristique fait quil soit utilisé pour simuler des sons dinstruments cuivrés, où une augmentation damplitude dune attaque enrichit automatiquement le spectre du son.
Je ne peux pas décrire en détail la possible application dun waveshaper sur un système de synthèse granulaire, car la formalisation et le contrôle des fonctions de transfert sont assez complexes. Toutefois, il serait intéressant que quelquun le fasse, car on pourrait bénéficier dun outil puissant pour transformer le timbre des grains à partir dune onde sinusoïdale et du paramètre de lindex de modulation. Cependant, si lon utilise un waveshaper pour effectuer des évolutions granulaires de timbre, il faudra contempler aussi la variation obligatoire des amplitudes des grains, et donc, on aura certaines limitations, car avec des grains faibles en amplitude le spectre sera toujours pauvre, et avec des grains forts le spectre sera toujours riche. Alors, cette application servira seulement pour la réalisation des nuages granulaires avec une esthétique spécifique reliée par exemple au fonctionnement des sons de type cuivré.
3.- Hybridation et sophistication des techniques pour la génération des formes donde des grains.
Limagination du compositeur et ses besoins spécifiques seules peuvent déterminer les différentes combinaisons des techniques pour la génération des formes donde des grains. Néanmoins, certaines techniques exigent des formes donde simples, tandis que dautres exigent de formes donde complexes, et donc, ceci va contribuer aussi à la détermination du mixage des techniques. Pour donner un exemple, la FM a besoin des formes donde simples, et il serait donc absurde dutiliser des échantillons complexes ou des ondes complexes crées par un waveshaper; en revanche, on pourrait employer des formes donde additives avec un nombre limité de composantes spectrales (de 1 à 10 par exemple) comme porteuses. Dautre part, les formes donde avec un spectre dense comme ceux qui sont générés par la FM ou par le waveshaper pourraient par exemple être utilisés pour être filtrés avec des filtres résonateurs ou même avec des filtres substractifs.
On a parlé des différentes applications de synthèse granulaire qui ont utilisé la FM (Truax, 1987. Jones et Parks, 1988). Toutefois, la FM est une technique assez complexe qui peut avoir plusieurs configurations différentes, et je suis sûr que beaucoup delles nont pas été employées jusquà ce jour pour la synthèse granulaire; pour donner quelques exemples: il y a des instruments FM avec porteuse double ou multiple (Dodge., Jerse, 1985. Roads, 1994) utilisés pour créer des régions formantiques dans le spectre; il y a des instruments FM avec modulateur multiple, où plusieurs oscillateurs modulent une seul oscillateur porteur; il y a des instruments FM avec feed-back (rétro-alimentation) (Roads, 1994), etc. Ces différentes configurations pourraient être essayées pour générer la forme donde des grains, avec lavantage que leur formalisation nest pas très compliquée.
Il y a beaucoup dautres techniques pour la génération dondes synthétiques et pour le traitement du signal des grains quon na pas mentionnées ici. Une étude étendue serait trop longue et naurait pas de place dans cette thèse. Ce qui ma intéressé dans cette section est de donner des exemples, des idées, et un aperçu de lampleur des possibilités pour la génération ou laffectation des formes donde des grains, en espérant que de futurs compositeurs et chercheurs puissent envisager la création de nouvelles méthodes, soit par lutilisation de nouvelles techniques ou par le mélange de différentes méthodes étudiées ici; bien évidemment, la manière de réaliser cette tâche dépendra de la façon alchimique de "cuisiner" les transformations sonores de chaque personne.